Sacré Sacre !
Le Sacre du Printemps de Stravinsky est l'œuvre musicale la plus chorégraphiée de l'histoire de la danse contemporaine.
Cette œuvre impétueuse, primitive, universelle porte un regard sur L'Humain et sa relation aux autres : rites de passage dans la vie, renaissance, que peut-on sacrifier ? Qui ? Homme ou femme ? Jusqu'où peut-on aller ?
En effet, le thème du Sacre du Printemps est universel dans sa dimension humaniste.
La musique de Stravinsky offre tout un panel de possibles, d'expériences sensibles. La musique contemporaine et la danse ne peuvent que jouer en écho, en résonance ; évocation poétique et analyse structurale organisent la transposition : l'organisation spatiale de la partition comme possible " partition chorégraphique ".
Note d’intention de la chorégraphe
C'est en travaillant avec une classe de grande section de maternelle, autour de la musique du Sacre du Printemps, que je me suis rendue compte que les rythmes tribaux, la magie des rites païens emportaient les enfants. La musique leur est très accessible, et la partition musicale (répétition, accents...) les amène vers un lâcher-prise corporel.
Le travail sur les rondes, le travail au sol, le tourbillon intérieur reflète cette jubilation que nous donne à entendre l'oeuvre musicale de Stravinsky.
Ces pistes de recherche avec les enfants ont été une première base de travail pour composer Sacré Sacre! avec les danseurs.
Le travail sur les rondes m' a amenée à me questionner sur l'idée d’un centre :
- centre anatomique de notre corps, communément nommé "centre de gravité"
- centre spatial dans un espace donné, que j'appelle "aire de jeux".
Ce centre qui occupe toute la place, pourquoi ne pas le déplacer corporellement, spatialement ? Des modules à partir de parties de corps ont été créés au sein même d'une partition qui elle-même n'a pas de centre fixe. C'est un véritable tourbillon qui se crée pour mieux se défaire ! L'idée de tourner autour d'un centre amène un vertige intérieur que je veux garder présent dans la pièce.
La réflexion sur les rondes m'a amené aussi à un travail avec les ballons : je transpose et expose les cellules à l'intérieur de notre corps, les rend visible et en joue ; on lance le ballon comme on repose dessus. Ces ballons sont comme une extension possible de notre propre corps en dialogue avec les autres.
Le travail au sol est un élément important dans le sens où l’on puise dans le sol pour trouver sa puissance, sa sève (on parle de renaissance de la nature, c'est là tout le thème du Sacre de Stravinsky).
Les enfants aiment danser dans le "monde du bas" : les appuis s'y décuplent. C’est une source complémentaire pour trouver la puissance chère à Stravinsky.
Enfin, la partition musicale offre une richesse sonore, avec les répétitions rythmiques, les accents irréguliers, les timbres.
Le jeu est de déstructurer l'oeuvre musicale car on la met en exergue, on la reconstruit.
C’est un véritable arc-en-ciel de couleurs que j'ai voulu recréer visuellement, tant corporellement que scéniquement.
Diane Soubeyre